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Rester vigilants sur les aspects sociaux

Jean-Pierre, 60 ans, président du club omnisports l’Union Sportive d’Ivry.
Propos recueillis le 26 mars.

« Nous avons arrêté toutes les activités du club quelques jours avant l’annonce du confinement, en accord avec la Ville. Les adhérents en ont très bien compris les raisons. Tous les championnats ont été stoppés. Que va-t-il se passer ensuite ? Les fédérations sportives sont comme nous, dans l’attente. On continue à suivre les affaires du club par vidéoconférence ou par mail, mais c’est relativement calme.

En attendant, je fais un peu d’activité physique, beaucoup de lecture, de la musique, de petits travaux à la maison… Je profite de ce moment pour réaliser tout ce que je repousse dans l’année par faute de temps. Pour l’instant, ça va : un peu de repos après l’année intense et les 100 ans du club. On verra dans un mois !

Cette crise prouve que les mouvements revendicatifs qui ont eu lieu, concernant notamment le manque de personnels et de moyens des hôpitaux, de l’éducation, étaient fondés. À l’issue du confinement, il faudra être très vigilants sur les aspects sociaux. »

Intermittent interrompu

Fabien, 46 ans, intermittent du spectacle, quartier Marat-Parmentier.
Propos recueillis le 24 mars.

« Les gens sortent beaucoup dehors mine de rien. De ma terrasse j’en vois qui sont dehors matin, midi et soir, je comprends pas. Ma femme sort travailler tous les deux jours et en profite pour faire quelques courses. Le matin, je fais l’école avec les gamins. C’est sympa, ça crée un autre rapport avec eux, mais faudrait pas que ça dure trois mois !

Apparemment, il est question de geler le statut des intermittents, en nous payant un mois de plus si l’on n’a pas fait nos heures. Ce serait en cours de signature avec les partenaires sociaux. Sauf que les tournées annulées, ça fait vraiment un manque à gagner. Et il sera dur de faire ses heures... »

Repères pour les précaires

Yves, 54 ans, animateur vacataire à la Maison de quartier d’Ivry-Port (MDQ) et bénévole à l’association De la rue à la scène.
Propos recueillis le 25 mars.

« À la Maison de quartier, de 9h à 17h, on accueille les personnes, les renseigne, les aide à remplir les attestations de sortie. On écoute aussi beaucoup, comme cette dame en pleurs qui n’en pouvait plus d’être confinée et qui voulait faire du bénévolat. On fait aussi de la collecte alimentaire qui est ensuite redistribuée aux familles dans le besoin, recensées par le CCAS ou la Maison. Parallèlement, je fais de la recherche de dons alimentaires pour l’association De la rue à la scène, gère l’équipe de bénévoles…

Avant le confinement, nous faisions une maraude par semaine. Depuis, c’est tous les soirs ! La situation des sans-abris est particulièrement difficile : ils se retrouvent sans rien, se cachent de peur des contrôles. On récupère des dons, la Ville nous fournit aussi des plateaux repas, tout comme la Protection civile, la Banque alimentaire... On a aussi besoin de kits d’hygiène, de couvertures, de sous-vêtements…

À 19h, tous les soirs, on fait un point fixe de distribution devant le Carrefour Market du centre Jeanne Hachette. C’est un repère pour les sans-abris. On les rassure, les aide à remplir les attestations. Masques, gants, distance : nous faisons très attention aux conditions d’hygiène et de sécurité. Ensuite, vers 20h, on sillonne la ville pour continuer la distribution, dans les lieux que nous avons repérés. De 50 à 110 repas sont donnés tous les soirs, et ça augmente avec le bouche à oreille.

Certains habitants aident aussi à leur niveau, lavent le linge de personnes à la rue, tissent des liens. Il y a une solidarité qui se met en place, on se sent soutenu. Mais beaucoup de centres d’accueil ferment, notamment sur Paris, la campagne des Restos du cœur est terminée, des associations ne fonctionnent plus par manque de bénévoles… Si le confinement dure, ça va être très difficile pour les personnes précaires. On le sent sur le terrain. D’un autre côté, beaucoup veulent se rendre utiles, ce qui est positif. »

Contact : 06 51 77 88 04.

« Respectez les consignes ! »

Besa, 37 ans, caissière dans un supermarché ivryen depuis quinze ans, travaille et habite dans le quartier Louis-Bertrand.
Propos recueilli le 25 mars.

« Je viens chaque jour au travail avec la peur au ventre car je suis asthmatique. Si ce virus m’attaquait, ce serait dangereux pour moi. Je suis divorcée, je vis seule avec mes enfants de 5, 12 et 16 ans, et ma mère âgée. C’est elle qui les garde depuis le début du confinement. S’il m’arrivait quelque chose, je ne sais pas ce que ma famille deviendrait. Je prie chaque jour pour que je ne tombe pas malade et que je ne ramène pas ce virus à la maison.

Comme mes collègues, je ne peux pas m’arrêter de travailler. Alors on se soutient entre nous. Et on continue à venir travailler par solidarité aussi avec les clients, afin qu’ils puissent faire leurs courses. À la caisse, qu’ils soient jeunes ou âgés, ils prennent de nos nouvelles, nous prenons des leurs. Cela permet de parler un peu quand on doit rester toute la journée à la maison. Nous, on rend service en étant là. On sent que les gens ont peur. Il y en a aussi qui ont du mal à comprendre qu’on ne peut entrer dans le magasin qu’un par un. Certains n’ont pas la patience d’attendre leur tour et deviennent agressifs… Heureusement, ce ne sont pas les plus nombreux.

Cette épidémie a créé de la panique. Deux semaines avant que le gouvernement ordonne de rester à la maison, les clients ont commencé à acheter en grosse quantité. Nos commandes ont dû être triplées, voire même plus, pour ce qui est du papier toilette, de l’huile, des pâtes, de la farine… Malgré cela, à partir de 14h, il n’y avait plus rien dans les rayons ! Pourtant, nous amenions des palettes sans arrêt, mais cela partait aussitôt. Des fois, nous n’avions pas le temps de les vider que les clients les ouvraient pour se servir.

Au magasin, des plexiglass ont été installés aux caisses pour nous protéger. Mais malgré tout, le client est vraiment près de nous. On nous a donné aussi des produits pour nous désinfecter les mains, on doit porter des gants et un masque. On est aussi sans arrêt en train de nettoyer et laver toutes les surfaces : les caisses, les sols, toutes les vitrines... Nous avons également le renfort d’une équipe de nettoyage extérieure.

Chaque jour, des clients nous remercient d’être là, et cela nous encourage ! Surtout avec tout ce stress qui fatigue plus que le travail. Ces derniers jours, je vois certains acheter que deux ou trois articles. Ils viennent pour sortir… Nous, on essaie de faire passer le message. On leur dit : moins on sort, plus vite l’épidémie va partir.

Alors, s’il vous plaît, les gens restez chez vous ! Même les caissières vous le demandent. Ne sortez vraiment que dans le cas où vous n’avez plus rien. Oui, c’est vrai, il fait beau. Mais arrêtez de vous balader. Sinon cette épidémie ne va jamais cesser ! Nous, nous sommes vraiment pressés que cela finisse ! »

Un beau métier que standardiste

Yamina, standardiste à la mairie durant le confinement.
Propos recueillis le 25 mars.

« Je suis ingénieure, chargée d'opérations, au service études et travaux au sein de la direction des bâtiments communaux. Comme d'autres agents communaux, je me suis portée volontaire pour assurer des missions autres que les miennes durant le confinement. C'est ma façon d'être solidaire et de participer à la continuité du service public, indispensable en temps de crise. Avec une autre collègue, Catherine Martin, déléguée à la protection des données personnelles, je suis standardiste à la mairie pour une période de 15 jours. C'est un beau métier, très humain. On se sent au plus près des besoins de la population. Les gens appellent pour savoir si les marchés sont bien fermés, s'ils peuvent avoir des attestations dérogatoires de déplacement, obtenir une aide pour un proche isolé...

Des personnes d'autres communes nous ont fait remarquer qu'Ivry faisait beaucoup de choses, notamment pour les retraités. Certains habitants ont besoin d'être rassurés, ils sont inquiets. Ils sont parfois un peu perdus. Un monsieur a même téléphoné pour nous commander un billet d'avion ! »

Le standard de la mairie 01 49 60 25 08 est opérationnel de 8h30 à 17h30. Et pour les urgences uniquement 24h/24, 7j/7.

Le bien-être par l’écran

Claire, fondatrice de l’association Mouvement & Créativité (depuis 1989). Quartier Centre-ville.
Propos recueillis le 26 mars.

« Quand le gouvernement a décidé le confinement, j’étais dans un état de sidération. C’était une catastrophe professionnelle pour moi qui propose à mon domicile des séances de Feldenkrais [méthode d’éducation somatique par le mouvement]. Je me suis mise immédiatement à me demander comment donner des cours en ligne. Par solidarité, une collègue m’a indiqué comment me servir d’une plateforme Internet, zoom.us. Mais c’est un saut « quantique » pour moi qui suis assez loin de tout ce qui est informatique ! Au moins, j’aurais appris de nouvelles choses !

Par ce biais, non seulement je peux corriger les postures de mes élèves, mais eux aussi se voient entre eux, prennent des nouvelles les uns des autres… Cela ouvre de nouvelles perspectives pour que les gens ne soient pas isolés, au niveau psychologique, sensible et physique. Je propose donc chaque semaine des séries de cours avec de nouveaux tarifs : pour un cours payé, on a accès à trois cours qu’on peut prendre quand on le veut.

Par ailleurs, je me sens extrêmement privilégiée, moi qui vis dans une maison avec jardin. Certains de mes élèves vivent sous les toits ou à plusieurs dans des studios. Cela creuse les inégalités, ce confinement. J’ai donc une vraie satisfaction à faire du bien aux gens à mon niveau. »

www.mouvement-creativite.fr

En poste à La Poste

Nadine, 57 ans, postière à Ivry-Port.
Propos recueillis le 23 mars.

« Nos services ne sont pas interrompus, on a une mission de service public... ce dont la direction se rappelle dans ces moments-là. Honnêtement, ça ne me gêne pas de venir travailler à l’accueil du centre de tri de la rue Ernest Renan.

Les usagers, principalement des professionnels et non des particuliers, sont hyper courtois, très respectueux des règles. Personnellement, j’ai l’attestation pour venir travailler, l’attestation pour sortir le chien quatre fois par jour et l’attestation pour aller m’occuper de ma mère en tant que personne aidante. »

Au-delà de la fiction

Amélie, 38 ans, auteure de romans. Quartier Ivry-Port.
Propos recueillis le 26 mars.

« Mon mec, qui est plasticien et moi, qui écris des livres avons l’habitude de travailler à la maison. Ça ne nous change pas beaucoup. Nous essayons de prendre les choses avec philosophie. J’avais surtout peur que ça déstabilise nos enfants. Alors nous faisons en sorte de garder un rythme. Nous nous occupons à tour de rôle de la maison, de notre fils de 8 mois et nous faisons classe à notre aînée qui est en CP à l’école Rosalind Franklin et dont la maîtresse nous envoie des cours via un site Internet.

Dans le cadre de ma résidence d’écriture, je tiens un journal en ligne. Mais j’ai décidé de prendre le contrepied des journaux de confinement des écrivains : je n’ai pas envie de raconter le réel et qui suis-je pour donner mon avis sur le virus ? J’ai plus d’inquiétude pour le monde que pour moi qui suis plutôt favorisée.

Mais ce qui se passe est complètement inédit.  Et si de nombreuses séries ou films ont déjà parlé de pandémies, au quotidien c’est très différent. C’est une peur diffuse, et si on n’est pas malade, en apparence il ne se passe rien ! Ce qui est sûr, c’est que cette pandémie va changer la façon dont on écrira des fictions à l’avenir. »

« Frustrante, cette guitare ! »

Mathieu, 41 ans, régisseur de spectacles et batteur du groupe Guili Guili Goulag. Quartier Louis-Bertrand-Mirabeau-Sémard.
Propos recueillis le 26 mars.

« Je m’occupe comme je peux, en respectant au maximum les consignes de confinement, vu que ma copine est asthmatique. Nous mangeons trop, trop gras et sucré, et lisons beaucoup, regardons des séries et des films, « bizarrement » ceux qui parlent de pandémies comme L’Armée des 12 singes ou 28 jours plus tard (rires). Nous évitons la surinformation pour éviter les thèses contradictoires. Alors, au réveil, c’est devenu obligatoire : on écoute un vinyle.

Le plus frustrant, c’est que le seul instrument que j’ai à disposition chez moi, c’est une guitare, qui n’est pas mon instrument de prédilection, moi qui suis batteur. Et je vois mes copains qui continuent de pratiquer, d’enregistrer des morceaux…

Le gros problème, c’est que depuis décembre, j’ai décidé de tenter l’intermittence en tant que régisseur plateau et lumières dans des théâtres. Le meilleur moment qui soit, quoi ! J’avais tout prévu, sauf la pandémie…  Je n’ai réalisé que la moitié de mes heures. Je ne sais pas si le seuil d’heures sera abaissé pour pouvoir bénéficier de ce régime.  Je crois que j’aurai toujours droit au régime général pendant la pandémie. Mais je n’en ai pas la certitude. »

https://guiliguiligoulag.bandcamp.com

Une solidarité naturelle

Saïd, directeur de la Maison municipale de quartier du Petit-Ivry.
Propos recueillis le 26 mars.

« Depuis le confinement, nous avons installé une table devant l'entrée de la Maison de quartier qui est fermée. Nous animons un point d'accueil et d'information pour les habitants. Quatre agents communaux volontaires y participent : Magali du secteur commerces, Kamel des espaces verts, Zorane de la jeunesse et moi qui occupe mon poste. Nous fournissons des attestations dérogatoires de déplacement et répondons à toutes les questions qui se posent. Les gens ont parfois besoin de parler pour rompre leur isolement.

J'ai été très surpris par l'élan de solidarité qui s'est manifesté naturellement. Cinquante bénévoles du quartier, de différentes générations, nous ont proposé leur aide notamment pour faire les courses aux personnes qui ne peuvent pas se déplacer. Les bénévoles sont aussi sollicités pour la livraison des colis de denrées alimentaires provenant du Secours populaire ou de la municipalité. Ces derniers sont destinés aux usagers en grande difficulté sociale.

Nous avons même inventé le métier d'écrivain public « par téléphone » pour épauler les personnes qui ne sont pas à l'aise avec l'écrit et qui rencontrent des problèmes administratifs urgents. »

Trois Maisons municipales de quartier vous accueillent pendant le confinement de 9h à 17h du mardi au samedi.

  • Maison municipale de quartier Petit-Ivry
    44 rue Jean Le Galleu - 01 72 04 66 06.
     
  • Maison municipale de quartier Monmousseau
    17 rue Gaston Monmousseau - 01 72 04 66 54.
     
  • Maison municipale de quartier Ivry-Port
    46 rue Jean-Jacques Rousseau - 01 72 04 63 26.
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