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Début mars, Valeria Kirian et son fils Constantin ont fui la ville martyre de Kharkiv, deuxième ville ukrainienne frappée sans relâche par l’armée russe. Ils sont hébergés dans l’un des hôtels d’Ivry-Port, réquisitionné par l’État. © Mairie d’Ivry-sur-Seine - David Merle

Une grande lassitude teintée de tristesse se lit sur le courageux visage de Valeria Kirian. L’expression de ceux qui ont effectué un interminable voyage pour échapper à un immense danger. Après deux nuits d’intenses bombardements à Kharkiv les 2 et 3 mars, cette veuve* de 27 ans, mère d’un petit Constantin de 4 ans, a fui. « J’ai pris tous les trains possibles pour arriver en France, raconte-t-elle. Nous avons traversé Kiev les lumières éteintes pour que les avions russes ne nous prennent pas pour cible. Dans des compartiments pour quatre, nous étions entre douze et quinze personnes ! »

Ce 24 mars, nous rencontrons la jeune femme et son enfant dans l’un des trois hôtels d’Ivry transformé en centre d’hébergement d’urgence par l’État. Deux d’entre eux sont gérés par le Centre d’action sociale protestant (Casp) et le troisième par le Groupe SOS. Au total, fin mars, environ 150 réfugiés ukrainiens étaient accueillis sur la commune dans le cadre du dispositif étatique. Les hommes de 18 à 60 ans étant mobilisés dans l’armée ukrainienne, les déplacés sont des familles, des mères isolées, des hommes seuls non ukrainiens (étudiant ou travailleur) ou des couples mixtes comme Iryna Skidan, 31 ans, et son compagnon algérien Lamine Sadour, 29 ans.

« Nous habitions la capitale Kiev, nous avons été réveillés par les bombardements du 24 février, premier jour de la guerre. C’était effroyable », confie à voix basse Iryna, professeure d’anglais. « Nous pensions que le conflit se règlerait par la diplomatie ou des sanctions économiques », précise Lamine, étudiant et chauffeur de taxi. Deux jours plus tard, les pilonnages ne s’arrêtant pas, ils décident de fuir en voiture : « Nous avons mis cinq jours à traverser la frontière polonaise tellement il y avait de voitures ! »

Blessures à l’âme

Aujourd’hui, l’heure est à l’urgence humanitaire, avec un accueil transitoire en hôtel. Seuls quelques Ukrainiens sont hébergés chez des Ivryens. « L’Union européenne leur accorde la "protection temporaire" »,  explique Aurélie El Hassak-Marzorati, directrice de l’opérateur Casp. C’est un statut privilégié, jamais appliqué auparavant, qui leur permet d’accéder rapidement à un travail, un logement, des soins, la scolarisation des enfants. Nous les accompagnons pour obtenir cette protection ou établir des diagnostics santé : les blessures à l’âme sont fortes. »

Les réfugiés qui choisissent la France, le font parce qu’ils y ont des attaches, même lointaines comme Valeria dont le mari était français, ou parce qu’ils maîtrisent la langue comme Lamine. Mais il faut du temps pour reconstruire un projet de vie, se délester des traumatismes de la guerre, avec l’espoir de retourner en Ukraine rejoindre ses proches restés près des zones de combat.

« Nous ne savons pas ce que nous allons devenir. Ma famille est à Marioupol, ville très détruite. », déplore Iryna. L’avenir est tout aussi incertain pour Valeria : « Je suis soulagée d’être ici mais inquiète par les nouvelles que mes parents me donnent deux fois par jour par téléphone : des civils ont encore été tués ce matin. C’est déstabilisant de voir un pays voisin comme la Russie nous attaquer. Nous ressentions de la loyauté à leur égard. J’avais un grand-père russe ! J’ai expliqué à mon fils qu’un vilain monsieur nous avait attaqués. Parfois, il fait des cauchemars, voit des fantômes. » Des frayeurs que beaucoup partagent avec cet enfant.

Catherine Mercadier

*Son mari est décédé avant la guerre.

Ivry solidaire !
« Ce sont les dons des Ivryens, l’élan de solidarité est fort ! »,se félicite Bertrand Quinet, adjoint au maire en charge des politiques solidaires, ce 22 mars, tandis qu’un semi-remorque récupère les 321 colis de vêtements, denrées non-périssables, produits d’hygiène ou jouets (voir le diaporama). Les associations locales ont également contribué : l’Arils (retraités), La Pagaille, l’USI Handball, Tamil Traditionnel, Partage et vie, ou le collège Romain Rolland.

Après un rassemblement le 25 février où le maire Philippe Bouyssou condamnait l’invasion de l’Ukraine, la Ville a organisé une collecte du 10 au 12 mars, en lien avec le Territoire Grand-Orly Seine Bièvre auquel Ivry est rattaché. Afin de limiter les coûts de transport, les collectes, qui ont aussi eu lieu dans d’autres communes, sont toutes convoyées début avril par l’opérateur Alteralia. Destination : les camps de réfugiés ukrainiens au nord de la Roumanie. 

Mobilisés, la Croix-Rouge, le Secours populaire français et l’Unicef  insistent sur l’importance des dons financiers, même minimes*. Si vous souhaitez donner de votre temps ou accueillir des réfugiés, envoyez un message à solidariteUkraine@ivry94.fr. Si vous hébergez des Ukrainiens, contactez le Comité communal d’action sociale (CCAS), 8 ter avenue Spinoza (derrière l’hôtel de ville) : 01 72 04 64 29.

Catherine Mercadier

* Faire un don :
- à la Croix-Rouge française : https://donner.croix-rouge.fr/urgence-ukraine/
- au Secours populaire Français : https://don.secourspopulaire.fr/ukraine/
- à l’Unicef

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