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Groupe de femmes revenant de déportation en mai 1945. Deux Ivryennes : Lise Ricol (1ère à droite en partant du bas) et Odette Dugué (4ème de gauche à droite en partant du bas). © Archives municipales/DR

« L'euphorie du retour a brutalement cédé la place aux pensées angoissantes, dont nous nous efforcions de faire abstraction […] Des quatre déportés de la famille qui retrouverai-je?[...] Le train s'arrête en pleine campagne et nous descendons sur le bas-côté pour nous dégourdir les jambes. Un prisonnier nous prend en photo. » Comme elle le relate dans son livre La Mégère de la rue Daguerre, la résistante Lise Ricol (connue sous son nom d'épouse Ricol-London) est rentrée d'Allemagne, en mai 1945, avec un groupe de femmes déportées comme elle, dans un convoi de prisonniers de guerre.

L'un d'eux immortalise cet instant et la photo a été retrouvée près de quarante ans plus tard. Parmi ces femmes, une autre résistante, également ivryenne et communiste : son amie Odette Dugué (nom d'épouse Moulan). Comme leurs camarades, elles ont survécu à l'enfer concentrationnaire. Elles ont notamment été affectées au kommando Leipzig, dépendant du camp de Buchenwald, dédié à l'armement. Le travail y était extrêmement pénible, eu égard notamment au manque cruel de nourriture dont elles souffraient. Avec d'autres détenues françaises, elles ont freiné la production et l'ont sabotée le plus possible.

Catherine Mercadier et Michèle Rault

Si vous disposez de photographies et documents sur Lise Ricol-London ou Odette Dugué (épouse Moulan), n'hésitez pas à contacter les Archives municipales : 01 49 60 25 19/25 69.

En raison de la crise sanitaire, la Journée nationale du souvenir de la déportation aura lieu en ligne le 25 avril à 11h sur le Facebook de la Ville d'Ivry.

TÉMOIGNAGE
« Le moral, l'élément moteur »

À travers plusieurs articles intitulés « De la Roquette à Ravensbrück », Odette Dugué a témoigné de sa déportation à l'automne 1945 dans La Défense, hebdomadaire du Secours populaire français. Dans cet extrait, elle décrit l'arrivée au camp de concentration pour femmes de Ravensbrück.

« À perte de vue, des baraques, grandes et petites, où s'entassent les prisonnières. De hauts murs sur lesquels sont plantés des fils électriques à haute tension, entourant le camp. […] Mes « Aufscherin », gardienne SS, la schague à la main, frappent sur leur passage toutes les malheureuses qui ne courent pas assez vite et les cris de « Los ! Los ! Schnell » sont une perpétuelle obsession. […] Par des exercices fantastiques, Marcelle Galli [résistante] a réussi à me passer un papier griffonné. Toutes m'entourent vivement pour connaître ces quelques mots d'une sœur qui nous a précédées d'un mois après nous avoir quittées à Rennes. « Nous partons, paraît-il, à Zwoodau, dans une usine d'aviation, ne vous en faites pas ; le moral doit rester l'élément moteur pour nous sauver de là. »

CHRONOLOGIE

Octobre 1940 :
Lise Ricol, Odette Dugué et Georgette Cortial, sage-femme à Vitry, dirigent des comités féminins de la banlieue sud mis en place par le Parti communiste. Objectif : mobiliser les femmes contre Vichy et l'occupant.

17 août 1942 :
Lise et Odette sont arrêtées en même temps À quelques jours d'écart, elles suivent un parcours similaire : Petite Roquette à Paris, condamnation aux travaux forcés (à perpétuité pour Lise), prison de Fresnes et celle de Rennes durant près de deux ans.

1944 :
Lise est déportée à Ravensbrück le 30 mai. Odette le 1er juin. Puis le kommando de Leipzig.

Avril 1945 :
Avant l'arrivée des Alliés qui libèrent les camps, les nazis les évacuent dans d'effroyables marches. Lise et Odette s'en échappent.

Après guerre :
Lise devient secrétaire de l'Union des Femmes françaises et épouse le résistant Artur London, dirigeant communiste tchèque victime des purges staliniennes. Son histoire a été racontée dans le film L'Aveu (1970) de Costa-Gavras. Odette, elle, sera adjointe au maire à Ivry et épouse le résistant Emile Moulan. Lise est sa témoin de mariage.

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