« Un instant s’il vous plaît, un livreur vient d’arriver. J’espère que ce sont les masques ! » Stéphanie Colas, cheffe de service de L’Étape ivryenne – Emmaüs solidarité, interrompt la conversation téléphonique pour s’en assurer. Ouf, ce sont bien les masques qui permettent aux salariés du 19 rue Marcel Lamant, de poursuivre leurs missions tout en se protégeant et en protégeant les bénéficiaires qui continuent d’affluer quotidiennement. « C’est la Drihl (Direction régionale et interdépartementale de l’hébergement et du logement) qui nous livre les masques, avec du gel hydroalcoolique, explique-t-elle. C’est la troisième fois qu’on en reçoit. Au début on avait la chance d’avoir un stock issu de nos ateliers de soins esthétiques et de podologie. Depuis les livraisons de la Dhril on a un masque par salarié et par jour, ce qui nous suffit. » Mais l’association manque de surblouses, de gants et de charlottes, introuvables auprès des fournisseurs.
Ce qui n’empêche pas l’Étape ivryenne de poursuivre son indispensable mission d’accueil de jour des plus démunis et des sans-domicile-fixe : petits déjeuners dès 9h chaque matin (hors week-ends), collation le midi, douches et adresse postale. « Notre accueil est quand même dégradé avec la crise sanitaire, explique Stéphanie Colas. On fait toujours les petits déjeuners assis à table à l’intérieur de nos locaux. Mais on a mis en place des mesures barrières : deux personnes par tables, bien espacées ; lavage des mains obligatoire et prise de température de tout le monde. Si quelqu’un a plus de 38, on ne lui refuse pas l’entrée mais on lui demande de porter un masque. On a aussi limité le nombre de douches à une dizaine par jour, contre quarante en temps normal, car il faut les désinfecter après chaque passage. Enfin, la distribution de paniers repas se fait à l’extérieur (voir photos). Ce sont souvent des sandwichs, des fruits, des yaourts, de l’eau ou des jus de fruits en fonction de ce que l’on reçoit. Le problème c’est que ça arrive par à coups, avec parfois des palettes d’un seul produit. Or, nous n’avons pas une grande capacité de stockage. »
Bénévoles confinés
L’accueil de jour reçoit entre 75 et 100 personnes du lundi au vendredi, quant elle en recevait jusqu’à 200 avant le coronavirus. Six des douze salariés doivent rester chez eux et ont été remplacés par des intérimaires. Quant aux bénévoles (voir encadré en fin d’article), souvent des personnes âgées, l’association leur a demandé de rester chez eux par précaution. Deux salariés sont d’ailleurs tombés malades sans que l’on sache s’il s’agissait du Covid 19 faute de tests. « Mais des bénévoles se sont manifestés pour revenir nous aider, donc on va les laisser revenir », souligne Stéphanie Colas.
Car le travail ne manque pas. Outre l’accueil de jour au local de la rue Marcel Lamant, s’ajoute la distribution de paniers repas et du courrier aux résidents des 19 studios de l’association, en ville. Mais aussi l’approvisionnement alimentaire de 55 ménages sans ressources logés par le Samu social (le 115) dans des hôtels du Val-de-Marne. « On le fait toute l’année, mais d’habitude ces familles viennent récupérer leurs colis ici, dans nos locaux. Là, c’est nous qui nous déplaçons pour les livrer. Ce qui nous fait beaucoup de travail en plus », souligne Stéphanie Colas. À cela s’ajoute des maraudes dans des bidonvilles, et l’ouverture exceptionnelle trois soirs par semaine (lundi, mercredi et vendredi) à l’occasion du ramadan, en mai, pour une distribution de repas lors de la rupture du jeûne.
« Très éprouvant »
« Dans notre petite structure, on fait pleins de choses », poursuit la cheffe de service. Car l’Étape ivryenne est conventionnée par la Drhil pour assurer toute l’année l’approvisionnement alimentaire de l’ensemble des accueils de jour du Val-de-Marne, qu’ils appartiennent à Emmaüs ou pas. « Le problème c’est qu’on est sur tous les fronts à la fois en ce moment. On est très sollicités. Heureusement on est une équipe très soudée, et tout ça nous soude encore plus. Mais c’est très éprouvant de faire attention à chaque geste, de respecter les espaces. Ça demande beaucoup d’explications auprès des bénéficiaires. Mais pour eux aussi c’est plus compliqué. On a beau leur faire des attestations (de circulation), ils se font contrôler et enquiquiner. On leur demande de ne pas stagner, donc cela veut dire marcher toute la journée, ce qui est impossible pour eux. Mais il y a eu des efforts réalisés par le 115, avec la réquisition d’hôtels. » Plus que jamais, le 19 rue Marcel Lamant est une étape indispensable.
Philippe Gril
On a besoin de vous !
Toute l’année, l’Étape ivryenne – Emmaüs solidarité a besoin de bénévoles dans cette période, et toute l’année. Si vous êtes intéressés, vous pouvez contacter l’équipe par mail : etapeivryenne@emmaus.asso.fr