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Réfugiée en France, la famille gazaouie Abushamla est accueillie à Ivry. Dans les mains des fils, une photographie de leur père tué à Gaza en décembre. Leur mère a préféré ne pas être à l’image. © Mairie d'Ivry-sur-Seine – Julie Subiry

« Nous étions dans une inquiétude totale, nous pensions que nous allions mourir. Les bombardements israéliens étaient incessants ». Ce 22 avril 2024, dans l’appartement ivryen mis à leur disposition par la mairie, Bassel, Mustafa et Youssef, respectivement âgés de 27, 23 et 21 ans, racontent la guerre qui dévaste la bande de Gaza depuis l’attaque du Hamas sur Israël en octobre dernier. Ils détaillent le jour où un missile est tombé sur l’immeuble où ils étaient hébergés dans le sud de l’enclave palestinienne.

C’était le 15 décembre 2023. Les trois jeunes hommes ainsi que leur frère Mohamad sont légèrement blessés.Leur père Ahmed est, lui, gravement touché à la tête et décède peu après. Employé à l’Institut français de Gaza depuis plus de vingt ans, il attendait d’être évacué vers la France, en conformité avec le droit national et international. Vêtue de noir, leur mère Reem pleure en silence.

Le 10 novembre 2023, elle a pu quitter Gaza via l’Égypte avec ses deux plus jeunes garçons et sa petite-fille Salma - la mère de l’enfant est morte d’un cancer il y a deux ans. Au poste-frontière, le nom de ses quatre fils majeurs n’étant pas inscrits sur la liste comme prévu, la famille a dû se résigner à se séparer, le père décidant de rester avec eux.

« Mon mari a payé de sa vie pour que nous soyons tous réfugiés en France », confie-t-elle dans un souffle. Après la mort tragique de leur père, les aînés errent dans les rues, personne ne voulant les abriter car des hommes, jeunes et seuls, représentent une cible à abattre prioritairement pour les soldats israéliens. Par l’intermédiaire de journalistes croisés à l’hôpital, ils finissent par joindre leur frère Majed, étudiant en France. Ce dernier contacte l’État français qui parvient à les évacuer le 31 décembre 2023.

Douleur du deuil

Aujourd’hui, les membres de cette famille gazaouie sont accompagnés par les services du ministère des Affaires étrangères et de l’Europe, et ceux de la municipalité d’Ivry et ont ainsi pu obtenir le statut de réfugiés et résident à Ivry. Géographiquement loin des combats, la guerre est pourtant là, à chaque heure du jour, via les médias et les messages des proches. « Lors d’un reportage à la télévision, nous avons même reconnu notre père quand il a été sorti des décombres », glisse Majed.

Leur deuil est encore infiniment douloureux, la peur d’apprendre de nouvelles morts toujours présente. À la rentrée, les frères, qui prennent des cours de français, iront à l’université. Leur nièce Salma, 3 ans, entrera à la maternelle. « Nous sommes très reconnaissants à la France et à la Ville d’Ivry pour leur accueil. C’était un rêve d’être sauvés, ça nous donne un nouvel espoir, concluent-ils. Mais il nous faudra du temps pour nous reconstruire. Visiter Paris, voir les lieux dont notre père nous parlait, réveille notre tristesse car il n’est plus là. »
Dévastée, leur mère Reem se lève, elle, la nuit, pour regarder ses enfants dormir et vérifier qu’ils sont toujours en vie.

Catherine Mercadier

Ivry, solidaire avec Gaza
Dimanche 2 juin 2024, à La Guinguette du Port, le concert du chanteur HK, en soutien à Gaza, a rassemblé plus d’un millier de personnes. La participation financière libre au concert a permis de collecter 3100€, somme qui a été remise par le Comité de jumelage d’Ivry à la famille de réfugiés palestiniens Abushamla afin de leur permettre d’améliorer leurs conditions de vie.

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